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Les livres de Jérôme Thirolle
28 octobre 2012

Voie Sacrée !

Voie Sacrée Photo JT

Longer la route, tel un passant anonyme et sans mémoire. Vouloir oublier mais ne pas y parvenir malgré ce beau soleil d’octobre, malgré ces étendues paisibles et infinies où l’épaisse forêt meusienne lèche de sa masse crénelée la bordure des champs.

La nature a reconquis quelques heures d’une vie nouvelle après les gelées du matin et, dans le ciel, de majestueux rassemblements de grues cendrées regroupées en impeccables chevrons d’altitude s’en vont vers des ailleurs pour retrouver une chaleur que les terres de l’Est ont abandonnée à d’autres.

Ce ruban d’asphalte tout en virages sur lequel je m’avance avec confiance est plongé dans une quiétude dominicale que le vrombissement quotidien des moteurs et de la vitesse ne vient pas troubler. Baudelaire avait raison et le plus indifférent des hommes ne pourrait renvoyer à l’auteur du Spleen de Paris son invitation célèbre sans renier sa part d’humanité : « Là tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté ». Et pourtant…

La route que j’arpente ne porte aucun  numéro. Contrairement à toutes les autres. Elle n’est pas inconnue pour autant, loin s’en faut. Elle a hérité d’une singularité qui la distingue des chemins de bitume que vous connaissez : elle porte un nom. Le sien. Un nom qu’elle a arraché à l’enfer de la Première Guerre Mondiale, au dédale meurtrier des courtines et des tranchées, à la déraison cyclopéenne de 1916 : Voie Sacrée.

Comment croire que le paysage idyllique que j’ai sous les yeux à cet instant fut, dans un cauchemar épouvantable, le calvaire reliant Bar-le-Duc à Verdun, permettant à l’Etat-major d’y déverser sans relâche hommes, munitions et matériels ? Combien de Poilus perdirent leurs illusions le long de ses bas-côtés en attendant d’y perdre la vie ? Mais le temps a passé, il a fait son Œuvre. Presque un siècle s’est écoulé depuis. Ne reste plus aujourd’hui que ce ruban quasi champêtre parsemé d’innombrables bornes kilométriques barbouillées de couleurs vives, rappelant au regard du promeneur insouciant que la paix s’arrache toujours dans la douleur et que ne pas l’oublier reste encore le meilleur moyen de la préserver.

 Sanglante Voie Sacrée, ta mémoire jette un voile douloureux sur l’horizon déchiré de soleil de ce dimanche d’automne…Voie Sacrée BLD PhotoJTVoie Sacrée Verdun PhotoJT

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