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Les livres de Jérôme Thirolle
21 décembre 2016

Cornelius Douze-Janvier (2/4) : confiture de cactus et musique

 

Cornélius photoJT

 

« Avec l’air satisfait de celui qui réussit tout ce qu’il entreprend, Cornélius Douze-Janvier finissait son petit-déjeuner tout en lisant d’un œil distrait les grands titres des journaux. Un en langue anglaise, pour le business, un en allemand par attachement à ses racines, et un en français, par vanité.

Il ne pouvait concevoir d’aborder la journée sans un rituel bien établi : déguster tout d’abord un œuf coque, parcourir ensuite l’actualité puis, accompagné d’un jus d’orange pressé et d’un café noir très serré sans sucre, avaler deux larges tranches de pain frais recouvertes de ce qu’il considérait comme son “délice du matin” : de la confiture de cactus qu’il se procurait à grand prix auprès d’une coopérative agricole de la province de Tiznit, au Maroc. Il appréciait les cactus - ou figues de barbarie - pour leur pauvreté en calories et leur richesse en sels minéraux, sucre, eau, vitamines (A ou C) et se comparait volontiers à cette plante des milieux arides, généreuse et se contentant de peu pour vivre…

Il prenait toujours le repas le plus matinal dans la véranda de sa bibliothèque et non dans une cuisine. Le dos tourné vers l’extérieur, il aimait sentir sur sa nuque les premières lueurs du jour tout en admirant l’aménagement de cette vaste pièce, l’œuvre d’une vie, comme il disait souvent. Là, confortablement installé dans un fauteuil acquis lors d’une prestigieuse vente aux enchères, il contemplait avec satisfaction les pièces les plus précieuses -à ses yeux- de sa collection de portraits. À commencer par une huile sur toile, d’inspiration légèrement cubiste, peinte par Elena, la mère de Bogdana. Elle y avait représenté ses trois filles, l’une au violon, l’autre à la contrebasse et la plus jeune à la flûte traversière, dans un enchevêtrement subtil d’entrelacs colorés et de partitions. De part et d’autre de ce tableau se trouvaient un anonyme de l’Ecole française du XVIIIe siècle, “femme jouant de la harpe”, et une toile peinte après-guerre, de conception plus classique que celle d’Elena, représentant le grand-père de Bogdana, célèbre violoncelliste russe assassiné dans d’obscures circonstances un peu après la chute du Mur de Berlin. Se savoir entouré de toutes ces icônes musicales le rapprochait encore un peu plus de la jeune femme et de sa sensibilité sensuelle exacerbée. »

couv le cœur des écorchés 1

 

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