Chapitre 35 La dernière chance (2/6)

Chapitre 35 La dernière chance (2/6)

— C’est moi, fit Hilario.

Le vieux Nator ne releva pas la tête. Il était songeur.

— Le Chef veut savoir si vous avez progressé.

L’homme à la toque crasseuse ne répondit pas.

— Ça t’arracherait la gueule de m’regarder quand j’te parle ! s’écria Hilario d’un air menaçant.

Nator releva alors lentement les yeux vers lui, d’un air bien plus effrayant encore.

— Sachez, monsieur, qu’il y a de cela fort longtemps j’ai croisé la route de ceux qu’on appelle les gens du voyage. L’un d’eux m’a dérobé une petite tabatière que je portais toujours sur moi. Je m’étais laissé distraire par une jeune effrontée, aussi frivole et légère qu’elle était belle. Son compagnon m’avait volé cette tabatière de quelques sous, un simple brimborion. Je lui ai demandé de me la rendre mais, non content de n’en rien faire, il m’a manqué de respect. Un peu comme vous à l’instant…

Hilario pâlit. Il venait de réaliser qu’il avait laissé son arme dans la voiture.

— Eh bien figurez-vous que j’ai tué de mes propres mains les deux bohémiens. L’homme et la femme. Rien qu’avec ma canne-serpent. Ils grimaçaient de douleur, me suppliaient mais je leur ai tout de même brisé le crâne, l’un après l’autre. Un bien triste spectacle… ajouta-t-il tout en caressant de ses doigts tordus par l’âge l’objet de mort qu’il possédait toujours.

Hilario tentait de masquer maladroitement le tremblement de ses mains. Une sueur froide lui parcourut l’échine. Autant le vieux Nator lui avait paru inoffensif les fois précédentes, autant il lui semblait soudain redoutable de violence contenue et de duplicité à l’instant présent.

— Excusez-moi, balbutia-t-il avec une humilité de circonstance. Le Chef voudrait savoir s’il y a du nouveau…

Nator le regarda durement à travers ses sourcils broussailleux.

— Non, rien pour le moment, fit-il en abaissant les yeux sur la treizième lame, seule carte retournée parmi beaucoup d’autres. Rien pour le moment…

à suivre...